L’Australie investit massivement dans la conservation dirigée par les Autochtones – le Canada peut en faire autant

par Valérie Courtois

12 mars 2020 | Initiative de leadership autochtone

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L’Australie vient d’annoncer qu’elle investira 700 millions de dollars dans les programmes des rangers autochtones, qui assurent la gestion du territoire partout au pays. Par conséquent, un plus grand nombre de rangers autochtones seront sur le terrain pour contrôler les feux de forêt et pour rétablir les populations d’animaux menacés, notamment les wallabys. Encore plus de familles autochtones pourront décrocher un emploi bien rémunéré dans leur communauté. Par ailleurs, un nombre accru de territoires seront protégés pour le compte de tous les Australiens et des générations à venir.

Le gouvernement australien étend son engagement envers les programmes de conservation dirigés par les Autochtones en raison de leur efficacité. Une recherche réalisée pour le ministère du premier ministre et du Cabinet a permis de constater que chaque dollar investi dans les programmes combinés des aires protégées autochtones et des rangers autochtones génère jusqu’à 3 $ sous forme d’avantages sociaux, économiques et culturels, notamment la diminution du soutien au revenu, l’amélioration de la santé et la baisse des frais de justice.

Nous pouvons produire les mêmes résultats au Canada à l’aide des programmes des gardiens autochtones et des aires protégées et de conservation autochtones (APCA). Toutefois, comme le confirme l'exemple australien, un soutien à long terme est nécessaire. Grâce à un appui continu, les nations autochtones pourront renforcer nos communautés, s’occuper des terres partout au pays et aider le Canada à respecter ses engagements internationaux en matière de conservation.

Nous avons déjà commencé le travail : depuis des décennies, plusieurs programmes des gardiens autochtones portent leurs fruits. L’Australie, pour sa part, démontre l’ampleur des réalisations que nous pouvons mener à bien.  

En Australie, plus de 120 équipes de rangers autochtones gèrent 75 aires protégées autochtones (APA), ce qui représente près de la moitié du réseau national des terres conservées. Le travail accompli par les rangers autochtones suscite de véritables changements, comme l’amélioration de la santé publique et davantage de possibilités pour les jeunes autochtones. Ils prennent soin de la terre tout en pansant les blessures causées par le colonialisme.

Leur travail revêt également une importance à l’échelle mondiale. L’Australie, tout comme le Canada, s’est engagée à protéger 17 % de ses terres et de ses eaux douces d’ici 2020 dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique. L’Australie a atteint son objectif six ans avant la date prévue et les nouvelles aires protégées autochtones constituent la part la plus importante de l’accroissement de la superficie des terres protégées dans ce pays.

J’ai eu le privilège de visiter l’un de ces endroits : l’aire protégée autochtone Warddeken. En discutant avec les rangers là-bas, j’ai été frappée par la stabilité de leur programme. Ils bénéficient d’un financement fédéral prévisible qui les aide à fidéliser les rangers chevronnés. Ils n’ont donc pas à regrouper différentes subventions, comme doivent le faire tant de responsables de programmes des gardiens autochtones.

Les jeunes grandissent en sachant qu’ils pourront trouver un emploi, dans leur communauté, lié à leur culture. Comme le dit Fred Hunter de Warddeken : « Les APA et les programmes des rangers autochtones illustrent une vision de nos aînés, où le lien entre les jeunes et le territoire est rétabli. Ils savaient que ce type d’approche serait une source de force et de fierté pour nos jeunes. »

Les programmes des gardiens autochtones offrent les mêmes possibilités au Canada. On compte actuellement une soixantaine de programmes des gardiens axés sur le rétablissement des populations d’animaux et de plantes, sur la surveillance de la qualité de l’eau et sur la mise en œuvre de plans de protection environnementaux dans le cadre de projets d’exploitation des ressources.

Plusieurs programmes des gardiens gèrent également des APCA, par exemple Thaidene Nëné, l’une des plus vastes au Canada. Thaidene Nëné a été établie en 2019 grâce au leadership de la Première Nation des Dénés Łutsël K’e. En regroupant les autres aires protégées et de conservation autochtones qui ont été proposées par plusieurs autres nations autochtones, il deviendrait possible de conserver le territoire à grande échelle – et d’assurer ainsi le respect de l’engagement du Canada à protéger 25 % de ses terres d’ici 2025.

Grâce à un soutien à long terme, les nations autochtones peuvent réaliser pleinement la promesse de conservation dirigée par les Autochtones pour nos communautés et pour le pays dans son ensemble. Le modèle australien ouvre la voie et confirme qu’un investissement soutenu dans l’intendance autochtone peut générer des retombées positives pour la terre, les gens et l’économie.

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